mardi, septembre 25, 2007

Le banc maudit de la station Frontenac

Lorsque je prends le métro pour aller et revenir de travailler, j'ai deux choix. Soit que je marche une vingtaine de minutes jusqu'à la station la plus proche, soit que je prend l'autobus au coin de chez moi et ça m'amène directement au métro, à la station Frontenac plus précisément.

La très grande majorité du temps, je prends l'autobus. Sauf le soir tard parce qu'il n'y a presque plus d'autobus alors aussi bien débarquer quelques stations plus tard et marcher.

Frontenac, c'est une station bizarre. Ce n'est pas un préjugé mais bien plutôt un jugé puisque c'est mon expérience qui parle. D'une part, il y a beaucoup de traffic autour de la station (qui donne sur la rue Ontario). Une salle des témoins de Jéhovah directement en face de la station et ce qui ressemble à des vautours tout autour de la station. Vous savez, ces gens qui ne semblent rien faire d'autre que d'être là, sans raison. Des petits revendeurs de drogue, les danseuses qui se rendent au Sexmania à un coin de rue.

Ah et j'oublie de dire que l'horaire de l'autobus est avant tout une suggestion qui pourrait, ou ne pourrait pas, s'avérer exacte.

Vendredi y'a une dizaine de jours, je me pointe à l'arrêt 5 minutes avant l'heure spécifiée et je me rends compte assez rapidement qu'il n'y aura pas d'autobus à l'heure prévue. Prochain bus dans plus de 30 minutes. Je m'asseois donc sur le banc plutôt que de faire le pied de grue debout. J'ai mon lecteur MP3 dans les oreilles et il est passé 23h.

Un gars s'asseoit à côté de moi sur le banc. Il me demande si l'autobus est passée. Non, lui dis-je, de toute évidence, y'a pas eu d'autobus, le prochain dans près de 45 minutes. Il commence à me raconter qu'il était à la taverne au coin et que la clientèle n'avait de toute évidence pas l'âge légal d'y être et de boire. Il me raconte d'où il vient, où il reste, qu'il s'est fait volé, etc. Pendant ce temps, je tente de lui montrer que ça m'intéresse peu en remettant mes écouteurs sur mes oreilles. Mais il continue.

Et puis il m'invite à aller prendre une bière avec lui. Je lui dit non merci, je suis trop fatiguée et anyway, non merci. Il insiste. Et insiste. Commence à me demander si je suis célibataire, si j'habite seule, sur quelle rue, etc. Je ne réponds pas mais ça me fait réfléchir.

Soudainement, pour la première fois de ma vie, je ne me sens pas à l'aise à l'idée d'embarquer à bord d'un autobus qui va me laisser à un coin de rue auquel il pourrait décider de sortir lui aussi et de me suivre jusqu'à ma porte de maison.

Il est maintenant debout et n'arrête pas de bouger alentour de moi. Je saisis mon cellulaire et j'appelle un ami qui reste à 2 coins de rue d'où je suis.

-Salut t'es chez vous présentement? Je suis à la station Frontenac et y'a un gars très weird qui... attends une minute.

*poof, le gars a disparut. Plus de trace*

Pendant que je parle au téléphone, une voiture ralentie et arrête devant le banc, un homme dans la 40-50aine me crie "heille, t'es pas mal belle, qu'est-ce que tu me ferais pour 20 piastres?"

-Ah ben, wow, c'est bizarre mais je pense que... ben... En tout cas, il est parti. Ok. Anyway, s'il revient, je vais aller chez vous, ok? Parce que je ne me sens pas à l'aise d'embarquer sur un bus avec lui qui me suit.

L'ami m'a rappellé 20 minutes plus tard me demandant si tout était ok.

Je n'ai plus revu le gars.

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Le lendemain, samedi, il est environ 16h, j'ai plusieurs sacs, je reviens de faire du magasinage. Encore une fois, j'arrive à 5 minutes après l'heure. L'autobus doit passer à 10 minutes après l'heure. Pas de trace de l'autobus. Nada. As usual finalement.

Je vais m'asseoir sur le même banc. Il fait soleil, c'est la fin de semaine. J'ai mes écouteurs sur les oreilles, mon lecteur MP3 à plein volume.

Un gars dans le début de la vingtaine un peu pouilleux s'asseoit à côté de moi. Bière à la main, il sort un gros sac ziploc de pot. "En veux-tu?" Non merci que je lui dis. Il est de toute évidence déjà très stone et/ou saoûl. Il se met à me réciter le discours classique de la gaugauche étudiante / Che / à bas le capitalisme / quel monde pourri... Il me reproche d'avoir un lecteur MP3, ce qui isole les gens et qui fait, selon lui, que deux étrangers sur un banc ne se parlent plus. "Veux-tu aller prendre une bière?" Non merci, ça va. Il remarque mes sacs et me posent des questions du genre "ouin, un sac de la Senza... tu dois être cochonne toi?". Il finit par se lever 5 minutes avant l'arrivée du bus et de disparaître dans le métro. Sa bière vide reste sur le banc.

J'ai depuis pris une grande décision. Même si l'autobus n'arrive pas, je vais éviter le banc...

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